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6 min

La taxonomie européenne : un outil prometteur à optimiser pour la finance durable

Dans un paysage de finance durable en pleine expansion mais parfois confus, la taxonomie européenne représente une avancée majeure. Son objectif est clair : créer un référentiel commun permettant d'orienter les financements vers des investissements véritablement durables. Ce financement de la transition via la taxonomie est déjà identifiée : selon la plateforme de la finance durable, les investissements alignés sur la taxonomie des grandes entreprises européennes cotées en bourse ont augmenté d'un tiers en 2023, atteignant 250 milliards d'euros à la fin de l'année.
Publié le
7/4/2025

Face à des définitions très libres de l'investissement durable, ce cadre apporte une rigueur bienvenue pour réduire la confusion et renforcer la transparence. En effet, la force de la taxonomie réside dans son objectivité. Elle établit des critères techniques précis qui permettent d'évaluer concrètement la contribution environnementale des activités économiques tout en limitant les risques de greenwashing.

Néanmoins, cet outil reste sous-exploité à l’heure actuelle et nécessite d’être repensé de manière à le rendre plus utilisable par les acteurs financiers.

Pourquoi cet outil reste sous-exploité ?

Bien que son objectif d'orienter les investissements vers la durabilité soit clair et ambitieux, la taxonomie européenne a été construite en se focalisant sur les calculs au détriment de l'expérience utilisateur. En négligeant de consulter les acteurs financiers sur leurs besoins concrets, elle a créé un cadre technique sophistiqué mais difficilement applicable dans la pratique quotidienne des institutions financières.

Ainsi, malgré son objectif, la taxonomie demeure aujourd'hui principalement un outil de reporting plutôt qu'un véritable levier de sélection des investissements. En effet, selon une étude réalisée par WeeFin en 2024, les fonds ESG s’engagent à investir en moyenne seulement 0,41% de leurs positions dans des titres alignés à la taxonomie.

Plusieurs obstacles expliquent cette situation :

  • Un déploiement trop lent face à l'urgence climatique : Les acteurs financiers et non financiers doivent agir maintenant, mais sont freinés par :
    • Un cadre trop sophistiqué générant une complexité excessive et des délais de mise en œuvre
    • Des critères DNSH (Do No Significant Harm) et techniques créant une dépendance à des données très granulaires, difficiles à obtenir
    • Des seuils techniques parfois trop contraignants, comme l'a souligné une étude britannique récente réalisée par le "Department for Business and Trade", pour permettre leur utilisation étendue. Définir des seuils élevés est nécessaire pour la définition d’activités réellement vertes. Néanmoins, mettre en place des taux intermédiaires permettraient une utilisation de la taxonomie plus commune.
  • Une approche binaire limitante : La volonté de ne promouvoir qu'une vision dichotomique de l'investissement durable (en identifiant uniquement les activités "ultra-vertes") sans nuances intermédiaires, complique sa mise en place pratique et ne permet pas de différencier une activité très polluante (par exemple le charbon), d’une activité très polluante en transition (par exemple un producteur d’électricité qui transforme son mix énergétique), d’une activité avec un impact environnemental limité et non concerné par la taxonomie verte (par exemple les établissements d’accueil pour personnes âgées) .
  • Un périmètre d'application restreint : Seules les grandes entreprises européennes sont actuellement soumises aux obligations de reporting taxonomique. Pour un gestionnaire d'actifs, il devient donc difficile de s'engager sur un pourcentage d'alignement taxonomique lorsque son univers d'investissement comprend de nombreuses entreprises non soumises à ces obligations.
  • Un manque de stabilité réglementaire : Les évolutions fréquentes du référentiel (comme l'amendement de 2023 sur les activités alignées aux objectifs climatiques) ne laissent pas suffisamment de temps aux acteurs pour s'approprier le cadre avant qu'il ne soit modifié.
  • Des méthodologies de calcul complexes : Le manque de compréhension concernant certaines méthodes de calcul (comme le GAR - Green Asset Ratio) et l'absence de clarifications suffisantes de la part du régulateur génèrent des ambiguïtés persistantes.

Comment rendre la taxonomie plus utilisable ?

La question centrale est donc : comment encourager les acteurs financiers à utiliser davantage cet outil, tout en préservant son objectivité fondamentale ?

Une taxonomie à trois dimensions

En s'appuyant sur différentes propositions d'experts, notamment celles de Natixis, du modèle canadien porté par Mark Carney ou encore de Ben Allen (co-rapporteur du groupe de travail technique de la Plateforme européenne sur la finance durable), WeeFin préconise une taxonomie structurée en trois catégories :

  1. Les activités vertes : Pour mettre en valeur les activités véritablement durables, comme c'est déjà le cas aujourd'hui.
  2. Les activités brunes : Pour identifier clairement les activités non durables vers lesquelles les investissements ne devraient pas être orientés. Cette distinction est essentielle pour différencier les activités simplement non éligibles à la taxonomie verte (comme certaines activités sociales) des activités constituant un réel frein à la transition (comme l'exploitation du charbon).
  3. Les activités en transition : Pour reconnaître les activités qui, sans être totalement durables, ont mis en place un plan crédible pour progresser vers la durabilité. Ces activités intermédiaires entre le vert et le brun permettraient d'intégrer une dimension dynamique essentielle à la transition écologique. Ces dernières pourraient également  intégrer la catégorie brune, en tant qu’activités actuellement non durables mais étant sur le chemin de la transition. Un suivi régulier serait indispensable pour garantir le respect de cette transition.

L'introduction de ces trois dimensions rendrait la taxonomie réellement exploitable pour les gestionnaires d'actifs. Aujourd'hui, de nombreux fonds ESG ne peuvent prétendre à un alignement taxonomique conséquent, leurs investissements n'étant pas intégralement "verts" selon les critères actuels. L'ajout d'un niveau intermédiaire permettrait à ces fonds d'intégrer le cadre taxonomique, facilitant ainsi son adoption à plus grande échelle.

Des améliorations concrètes

Pour rendre la taxonomie plus opérationnelle, WeeFin est aligné avec les suggestions suivantes :

  • Élargir le champ des activités éligibles/alignées : Par exemple, actuellement, seuls deux secteurs d'activités peuvent contribuer aux objectifs de conservation et protection de la biodiversité. La Commission Européenne a d'ailleurs mandaté la Plateforme européenne pour proposer de nouvelles activités alignées (cf consultation)
  • Simplifier les templates de reporting : Notamment au niveau des entités financières tels que les établissements de crédit, pour faciliter l'adoption et la mise en œuvre.
  • Clarifier et simplifier les critères techniques et méthodes de calcul : Pour permettre une appropriation plus rapide et efficace par l'ensemble des acteurs.

La taxonomie européenne reste un formidable levier pour orienter les flux financiers vers une économie plus durable. Avec les ajustements appropriés et le soutien de solutions technologiques adaptées, elle pourra pleinement jouer son rôle dans la transition écologique que nous devons collectivement accomplir.

Position WeeFin

WeeFin est une fintech d'impact française fondée en 2018 avec une mission claire : élever les standards de la finance durable et en faire la norme. Convaincus que la durabilité devrait être au cœur de chaque décision d'investissement, nous avons développé la première technologie SaaS entièrement dédiée à la finance durable. En combinant une expertise financière approfondie avec une technologie innovante, nous relevons l'un des plus grands défis de l'industrie aujourd'hui : rendre la finance durable à la fois actionnable et impactante pour nos clients (gestionnaires d'actifs, propriétaires d'actifs, gestionnaires de patrimoine, serviteurs d'actifs, fonds de pension., fonds de pension...).

Avec notre position stratégique au coeur de l’écosystème financier et à travers notre contact constant avec les providers, nous sommes plus qu'un simple fournisseur de technologie - nous sommes des partenaires du parcours de durabilité de nos clients. Nous aidons les institutions financières non seulement à répondre aux exigences réglementaires, mais aussi à mener la transition vers une économie mondiale plus juste et plus résiliente.

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